Les deux méthodes qui n'en font qu'une

Publié le par Jacobin

 

Certes la loi a été votée et les manifestants sont rentrés chez eux. Mais il n'est au pouvoir de personne d'effacer que huit manifestations massives viennent d'avoir lieu et que le pays a été au bord de la grève générale. Le gouvernement n'a pas reculé, mais les manifestants n'ont pas l'impression d'avoir perdu. Ils n'ont pas renoncé à faire reculer ce gouvernement ou un autre.

Qu'avons-nous vu? Un affrontement entre deux volontés. D'un côté, trois consensus droite-gauche. D'abord sur la nécessité d'une réforme des retraites, sans un mot sur les causes réelles des « déficits » sociaux, donc avec la volonté de respecter les engagements de Lisbonne pris par Chirac et Jospin. Cet accord était doublé d'un consensus de « l'intersyndicale » pour refuser de dire « retrait ». Et enfin l'accord de Chérèque et du gouvernement sur la retraite par points tentait d'ouvrir grand la porte aux fonds de pension. Face à ces consensus, une classe ouvrière qui calmement exigeait son droit, refusait à la fois les reculs déjà imposés et surtout la perspective d'une déchéance annoncée de ses conditions de vie en exigeant le retrait de cette contre-réforme.

Existe-t-il une alternative aujourd'hui?

Fillon a déclaré le 3 novembre : « Ce à quoi nous avons assisté ces dernières semaines c’est, en tout cas je l’espère, les derniers soubresauts d’un modèle ancien. ». Fillon regrette que la loi du 20 août 2008 sur la représentativité ne s'applique pas encore pleinement, et espère que toutes les contre-réformes seront à l'avenir élaborées et appliquées par le « dialogue social », c'est-à-dire avec les syndicats qu'il aura choisis. Vieux rêve corporatiste récurrent mais auquel le consensus redonne une actualité.

En effet, François Hollande n'a-t-il pas déclaré de son côté : « « Celui qui sera élu à gauche devra faire une séance longue, plusieurs mois même, de dialogue social sur trois enjeux : l’emploi, la protection sociale et les conditions de travail (...). J’appelle ça les assises de la démocratie sociale. ». Le Guen, proche de DSK, ne dit pas autre chose avec sa proposition de rechercher un « compromis social » qui « implique que tout le monde fasse des efforts ». Et, comme de ce côté-là on nous promet (Bianco) « du sang et des larmes »si la gauche revient au pouvoir, où est la différence?

La méthode Hollande rejoint donc celle de Fillon, et s'il trahit ainsi la classe ouvrière, il est au moins fidèle à ses convictions qui n'ont pas l'air d'avoir beaucoup changé depuis le temps où il secondait Jacques Delors au sein du club Témoin. La formule de son socialisme ressemble à celle du picon-citron-curaçao du César de Pagnol : la moitiè de démocratie chrétienne, la moitié de corporatisme et un quart de social-démocratie, pour la couleur.

Mais malgré ces obstacles, la classe ouvrière est têtue: elle ne peut se résoudre à ce que la messe soit dite pour les retraites! Les tenants d'un nouveau corporatisme devraient se souvenir que déjà en 1969 De Gaulle fut renvoyé dans ses foyers pour avoir voulu intégrer les syndicats au Sénat. C'est la responsabilité des militants qui croient encore au socialisme, au « socialisme maintenu », de regrouper tous ceux qui ont commencé à identifier les obstacles pour reconstruire ensemble un véritable parti socialiste et aider la classe ouvrière à gagner.

Aimé SAVY

 

 

 

Publié dans Défense du socialisme

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